Le processus de recrutement intègre parfois la prise de référence. Celle-ci vient en fin de parcours, souvent juste après l’entretien d’embauche. La collecte d’informations sur le candidat auprès de ces anciens employeurs représente un bon moyen de renforcer son appréciation.
Néanmoins, la prise de référence est-elle vraiment la panacée du recrutement, comme certains le préconisent ? Pas si sûr… Explications et précisions sur ce levier de recrutement à manier avec précaution.
Pour une entreprise, un recrutement raté représente un coût non négligeable en termes financiers et humains. La pression repose donc sur les épaules du recruteur qui doit trouver la perle rare.
En plus des CV, lettres de motivation et entretiens, les recruteurs ont de plus en plus souvent tendance à contacter l’ancien manager du candidat, son N+1 dans son (ou ses) précédent(s) poste(s).
Ce contrôle des compétences est devenu quasiment obligé dans tout processus de recrutement, même sur des postes peu qualifiés. Cependant, le recruteur doit manier la prise de référence avec précaution, tant au niveau légal que dans l’analyse des informations recueillies.
La prise de référence : attention danger !
Évacuons tout de suite le cadre législatif entourant cette prise de référence.
En effet, pour éviter tout abus, le Code du travail encadre strictement son usage.
Les articles L1221-6, 8 et 9 sont formels :
– la prise de référence, comme toutes méthodes et techniques d’aides au recrutement, doit faire l’objet d’une information préalable auprès du candidat. Même si le candidat a déjà fourni sur son CV ou sa lettre de motivation le contact de référents, vous devez obtenir son accord pour concrétiser vos demandes. On parle bien ici d’un accord écrit qui stipule les informations de contact du candidat ET du référent, le principe de son accord et sa durée de validité, le tout bien sûr daté et signé. Sans ce document, tout contrôle de référence est passible d’une poursuite auprès de la CNIL, des Prud’hommes.
– les demandes doivent rester dans la sphère professionnelle pour « apprécier sa capacité à occuper l’emploi proposé ou ses aptitudes professionnelles. Ces informations doivent présenter un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles. » Art L1221-6 du code du travail. Pas de questions personnelles donc… Et c’est une des problématiques, notamment dans le recrutement des cadres. Comment contrôler les soft skills (compétences humaines) sans déborder du monde strictement professionnel ? Un exercice parfois difficile.
– les informations recueillies doivent rester confidentielles.
La prise de référence, pour quoi faire ?
Un candidat a passé avec brio les étapes de recrutement jusqu’au fameux entretien d’embauche. Suite à celui-ci, le recruteur contacte les anciens employeurs pour contrôler certaines informations et mieux cerner le candidat.
Ce que la prise de référence doit être
Contrôler les compétences professionnelles du candidat semble être le but principal de la prise de référence. Or ce processus doit aller bien au-delà d’un simple contrôle des compétences et expériences professionnelles, du salaire et du temps passé sur le poste. Rester sur ces renseignements basiques est une erreur à éviter : vous faites perdre du temps au référent pour des informations peu stratégiques. En revanche, ces questions « lambda » peuvent être un bon début dans la conversation avec l’ancien employeur, avant de passer aux choses sérieuses.
La prise de référence doit être un moment-clé découlant des informations et appréciations lors du processus de recrutement.
Durant l’entretien, le recruteur doit identifier en amont les choses à « éclaircir » avec les référents. Cela peut aller de questions précises sur une expérience professionnelle identifiée aux fameuses compétences sociétales, les soft skills : esprit d’équipe, attitude, relationnel, capacité de gestion de crise, etc. Ne perdez pas de vue qu’un bon employé est un employé qui reste sur le poste. Son intégration dépasse les compétences professionnelles, il doit aussi « embrasser » la culture de votre entreprise et respecter ses valeurs.
Le recruteur prépare évidemment en amont les questions à poser, des questions ouvertes bien sûr, pour récolter si besoin des informations nouvelles, non-évoquées durant la phase de recrutement. Le référent sera sûrement positif, à vous de discerner les hésitations, les non-dits, les approximations : un vrai travail de détective !
Cette prise de référence se situe en fin de parcours d’embauche. Elle intervient dans la majorité des cas entre l’entretien d’embauche et un futur rendez-vous avec le candidat, la dernière marche avant l’embauche. Ce sera l’occasion de revenir sur les informations recueillies auprès des référents.
Ce que la prise de référence ne doit pas être
Rappelons ici que les questions d’ordre privé n’ont pas lieu d’être : santé, situation familiale, religion, etc.
La règle numéro un de la prise de référence est avant tout de la tenir pour ce qu’elle est : une étape dans un processus plus large. Et non pas LA chose qui va décider du recrutement.
Les appréciations de l’ancien manager du candidat doivent ainsi être entendues avec précaution. Il est d’ailleurs courant d’interroger au moins deux référents pour croiser les informations.
Le facteur humain joue toujours un rôle dans un parcours professionnel : un manager peut avoir des griefs contre son ancien employé, ou au contraire l’encenser car il l’a apprécié. Dans les deux cas, les informations sont biaisées. Vous devez alors faire preuve de discernement autant à propos du candidat que du référent. N’hésitez pas à vérifier si la personne consultée est bien un ancien manager direct ou un collègue de bureau conciliant…
Il faut faire attention à toute information, soit trop dithyrambique soit trop négative. Ces informations ne sont pas forcément données pour nuire ou aider le candidat. Le jugement peut être faussé de manière simple : si le manager avait une bonne relation, il aura tendance à oublier les mauvais moments ou les mauvais choix.
Evidemment, le candidat vous a fourni des référents avec lequel il n’a pas eu de soucis. Il est donc rare de tomber sur un manager qui va parler négativement de son ancien employé. Vous devez prendre en compte ce facteur lors de vos entretiens avec l’employeur et essayer de dépasser les simples généralités, en sollicitant des faits précis sur les missions remplies.
Bien sûr, si vous avez identifié une problématique lors du parcours de recrutement, et qu’elle est confirmée par les deux référents, vous devez en tenir compte.
Il faut ainsi analyser les conclusions des prises de références avec précision et recul pour qu’elles ne prennent pas le pas sur les informations recueillies lors des autres phases du recrutement. Et sur votre propre évaluation de recruteur.
Alors, prise de référence ou pas ?
Pour un poste de cadre, il est difficile de passer à côté de cette étape de contrôle.
Les candidats sont souvent hyper-qualifiés, ont un parcours professionnel et des compétences similaires. La prise de référence va aider à la décision finale en identifiant finement les fameux soft skills.
En plus des écueils déjà cités (cadre législatif, vision et conseils biaisés de l’ancien employeur, difficulté de faire remonter des informations pertinentes de l’entretien, etc.), il ne faut pas négliger l’aspect chronophage.
Le recruteur devra demander en amont l’autorisation aux candidats, faire une recherche sur les référents, les contacter avant tout appel téléphonique, préparer des questions pointues, faire l’entretien, analyser les réponses, les rapprocher de ses propres conclusions, les intégrer dans l’entretien futur.
Face à ces problématiques, il est peut-être judicieux de déléguer cette opération auprès d’intervenants externes, spécialisés dans ce type de démarche.
Cependant, commissionner un cabinet de recrutement juste pour la prise de référence s’avère aussi épineux : les professionnels n’auront pas une vision claire de l’ensemble du processus de recrutement.
Le plus simple dans ces cas-là, outre de faire l’impasse sur la prise de références, est de faire appel à un cabinet de chasseurs de têtes pour l’ensemble du processus d’embauche.