Article rédigé par Gilles Herrmann – Directeur Marketing et Communication | Grande Consommation | Services BtoC | Innovation | Transformation Digitale. Un de nos nombreux Talents Juste, qui partage avec nous ses idées et son expertise !
Le marché de l’occasion a toujours existé : c’est par exemple le cas du marché de l’automobile où le nombre d’immatriculations de voitures d’occasion est aujourd’hui 3 fois supérieur à celui de voitures neuves (et l’âge médian d’un acheteur de véhicule neuf est de…60 ans !).
Dans la même logique, les consommateurs ont pris l’habitude depuis des années d’acheter des meubles ou du high-tech d’occasion. Le succès du site Leboncoin atteste de cette tendance avec 27 millions d’annonces en ligne et 28,7 millions de visiteurs uniques par mois dont les principaux moteurs sont l’immobilier, l’automobile et l’emploi.
Ce qui est plus nouveau, le phénomène de la « seconde main » s’est emballé depuis quelques années sur l’univers de la mode, en particulier à destination de la cible des 20-35 ans. Les Millennials représentent 33% de ces acheteurs de vêtements d’occasion.
On estime ainsi qu’en 2028 le marché du vêtement d’occasion pèsera 30% de plus que le marché du fast-fashion.
Emblématique de cette tendance, le site Vinted compte plus de 11 millions de membres rien qu’en France. Chaque jour, 2.8 millions d’utilisateurs fréquentent le site devenu l’un des 5 sites e-commerce les plus fréquentés… sans toutefois que le site ne parvienne à être rentable malgré sa valorisation à plus d’1 milliard d’euros.
En réaction, les marques se sont empressées de s’adapter à cette tendance :
Les vêtements 1er âge, auparavant recyclés dans des Dépôts/Ventes ou des brocantes peuvent être aujourd’hui repris par les marques, tel l’ïdTroc d’ïdkids, byKiabi et bien d’autres. Notons que Decathlon anticipa cette tendance en lançant le Trocathlon dès 1986.
De même, les marques plébiscitées par les Millennials ont compris qu’elles pouvaient déclencher une visite en points de vente lors du dépôt/retrait des vêtements et lors de l’utilisation des bons d’achats obtenus : Corner Comme Neuve de Bocage, bornes de collectes Bonobo, collecte pour recyclage par Jules, remise en vente on-line pour Ba&sh ou Camaieu, corner jouets d’occasion Pic’Occaz chez Picwictoys. H&M a testé à Hambourg le service Take Care consistant à permettre à ses clients de réparer ses propres vêtements à l’aide de patchs et de machines à coudre mises à disposition.
Ces derniers mois, les enseignes annoncent les unes après les autres leur offre : Seconde main de Zalando, La Reboucle de la Redoute, Cdiscount Occasion, Mon dressing d’occasion(s) de Cora, etc …
Selon une récente étude, 32 % des Français déclarent avoir acquis au moins un vêtement d’occasion en 2019, contre 16 % en 2018. Et ils devraient être 44 % à avoir franchi le pas en 2020.
A l’effet Drive-to-Store de ces propositions, les marques et enseignes vont également bénéficier d’un regain d’image de marque en tant que marque citoyenne (aide au pouvoir d’achat) ou éco-responsable face aux dégâts du fast-fashion.
Revendiquant depuis longtemps ce positionnement responsable, la marque Patagonia invite sur son site à privilégier le recyclage et l’achat des vêtements d’occasion qu’elle propose.
Plus étonnant, le luxe s’y met également : Cartier vient de dédier un espace dans sa boutique du Faubourg Saint-Honoré consacré à ses montres d’occasion. Richard Mille annonce une offre similaire à Londres.
Même JM Weston a lancé en 2019 une offre Vintage de chaussures remises à neuf dans ses ateliers.
A l’autre extrémité de l’échelle de valeur, Ikea propose depuis quelques années la revente de ses meubles d’occasion dans l’espace Bonne Trouvaille de ses magasins, un concept que l’enseigne souhaite amplifier dans le cadre de son nouveau concept « Circular Hub ».
Enfin, à ce phénomène s’ajoute une caractéristique propre aux Millennials et à leur revendication de singularité : l’achat de vêtement Vintage permet l’accès au vêtement rare, celui qui rendra unique et différent des autres. Dans une époque de fast-consumption, on devient ainsi porteur d’un morceau du passé et garant du futur à travers la protection des ressources naturelles.
Bémol à cette tendance : les associations caritatives telles la Croix-Rouge ou Emmaüs rencontrent aujourd’hui plus de difficultés à trouver des vêtements en quantité et de qualité, à même de générer les revenus nécessaires à leur mission sociale.
Cependant, une question majeure reste posée pour tous ces acteurs : celle de la rentabilité de ces offres de consommation responsable, au-delà d’un travail sur leur image de marque.
Gilles Herrmann
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