Qu’ils interviennent dans le cadre d’un renfort, d’une situation de crise ou d’un soutien aux équipes en place pour passer un cap difficile, les managers de transition se posent en levier pour relancer l’organisation.
Alors que la crise sanitaire et économique due au Covid-19 fait rage dans le secteur du tourisme , Pierre & Vacances Center Parcs vient de se trouver un nouveau directeur général. Agé de 44 ans et féru de numérique, Franck Gervais, ex-patron Europe d’Accor, remplace ainsi Yann Caillère, un proche de Gérard Brémond, le président-fondateur du numéro un européen des résidences de loisirs, qui l’avait chargé, dès septembre 2019, d’élaborer le plan de transformation du groupe. Une mission à durée limitée pour les besoins de laquelle Yann Caillière a fait appel à des managers de transition du cabinet Valtus.
Comme Pierre & Vacances Center Parcs, des entreprises, en situation délicate ou de crise, découvrent l’utilité opérationnelle du management de transition . Les missions de mandataire social, certes, se multiplient mais ne sont pas les plus nombreuses, la plupart des managers de transition sont appelés pour remplacer, au pied levé, des cadres dirigeants rendus indisponibles ou bien aider une entreprise à passer un cap difficile. C’est, ici, un directeur financier à qui un équipementier automobile demande de piloter sa trésorerie à l’échelle du groupe ; là, une directrice des ressources humaines(DRH) qui se voit chargée de clore un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ; là encore, un directeur des systèmes d’information (DSI) dont la mission est d’informatiser tout un entrepôt ou un pro de la supply chain – fonction on ne peut plus stratégique depuis le Covid – qui a celle de reconfigurer tout un processus d’approvisionnement ; ou encore, un super directeur comptable à vite impliquer dans une opération de «carve out». Autant de situations pour lesquelles des professionnels expérimentés, bons animateurs d’équipes et à leur affaire dans l’incertitude sont en moyenne mobilisés 7 mois.
Reprise attendue cette année
« Plus de 50% de nos missions portent sur de la transformation et de la conduite de projets, contre 15 à 20% il y a 5 ans« , détaille Thierry Grimaux, associé de Valtus, le leader européen du secteur.
Dans son rôle d’apporteur de solutions, le manager de transition apprécie de pouvoir se rendre au plus vite sur le terrain. « C’est primordial d’évaluer sur place un site industriel et d’en sentir l’ambiance de travail« , estime Thierry Grimaux. Mais la crise sanitaire et la distanciation physique compliquent les choses. Si la fédération France Transition a constaté une baisse d’activité de 20 à 25% en 2020, elle table toutefois sur une reprise dès cette année. Patrick Abadie, président fondateur de Delville Management, sent d’ailleurs « quelques frémissements » depuis « une mission, démarrée après août, chez une start-up qui invente l’agroalimentaire de demain et qui, soutenue par un fonds d’investissement, cherche des compétences en RH ou en marketing sans pour autant souhaiter s’engager sur le long terme« .
Les PME, ETI et grandes entreprises trouvent ainsi une solution, certes chères – entre 140.00 et 420.000 euros sur sept mois -, mais qui inclut « l’efficacité et la forte valeur ajoutée d’un expert, situé hors des jeux politiques et des rivalités internes« , souligne un professionnel qui a pris en main un site industriel en crise. Estimé à 440 millions d’euros, le marché du management de transition compte 90 acteurs (quelque 120 si on ajoute les non-adhérents à la fédération). Valtus, numéro un, et Delville Management, deuxième, dominent un groupe de 10 multispécialistes (65% de l’activité). En l’absence de classement officiel, ont notamment été cités, pour les besoins de cet article, X-PM, EIM, Robert Walters ainsi que NIM, 400 Partners, Procadres Internationalt, IMT Partners ou encore MPI Executive.
D’autres acteurs, cette fois spécialisés comme Réseau 137 de Raymond Soubie, se focalisent sur le social ou tel Atorus Executive sur le juridique ou encore la RSE, la communication, le digital et le marketing, expertises du tout jeune cabinet Juste.
Les organisations en situation de crise ou d’urgence ont donc l’embarras du choix. Mais elles doivent bien garder en tête que le management de transition n’est ni de la chasse de têtes ni du conseil, et encore moins de l’intérim traditionnel. Plus opérationnel que du consulting, d’un niveau bien supérieur à du classique intérim, il se veut plus flexible qu’un recrutement en contrat à durée indéterminée (CDI), qu’il ne met à priori pas en danger, étant réservé aux situations sensibles. A la différence des chasseurs de tête, les cabinets de management de transition agissent vite et peuvent mobiliser, en deux ou trois jours, un professionnel surdimensionné pour une mission donnée. Cet oiseau rare se voit parfois proposer, en fin de mission, un CDI. Encore faut-il qu’il le veuille ! Le métier – qui comprend des cadre en fin de carrière comme des quadras et des quinquas heureux de maîtriser leur agenda – a rajeuni et s’est féminisé. Fonctionnant en mode projet, le ou la manager de transition apprécie de disposer d’une vraie feuille de route. Il lui arrive même de participer au recrutement en CDI de son successeur.
Muriel Jasor